« Les médias participatifs
: des modèles éditoriaux émergents sur Internet. Les
exemples d'Agoravox
et de la Wikipedia francophone ».
Lionel Barbe
Université Paris 2 - Institut Français de Presse, France
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Selon une publication récente du magazine Nature , Wikipedia,
l’encyclopédie libre sur internet, propose des articles
d’une qualité comparable à ceux de l’Encyclopedia
Britannica. En France, Agoravox, le site de journalisme citoyen dont
le fonctionnement est inspiré du site Coréen Ohmynews,
connaît un fort succès. Comment s’organisent les
modèles éditoriaux de ces médias décentralisés
? Comment parviennent-ils à être efficaces ?
Agoravox et Wikipedia se basent tous deux sur des modèles
éditoriaux participatifs. Ne disposant pas de journalistes
ou de rédacteurs professionnels, ces deux sites comptent uniquement
sur l’investissement bénévole de citoyens pour
les alimenter en contenu et créer une dynamique communautaire.
Ils proposent des modes de publication et d’édition alternatifs,
basés sur l’autoproduction et l’autorégulation
des contenus.
Cependant, si les sites communautaires sont techniquement de très
efficaces diffuseurs d’information, ils risquent néanmoins
de devenir la proie des rumeurs et des tentatives de manipulation.
Leur liberté et leur rapidité de publication, qui constituent
leurs atouts majeurs, pourraient servir à des individus dont
les objectifs ne relèvent pas de la seule volonté d’informer.
Pour remédier à ce risque, différents moyens
ont été mis en œuvre. Qu’elle soit pratiquée
antérieurement (Agoravox) ou postérieurement (Wikipedia)
à la publication, l’autorégulation permet dans
la plupart des cas d’éviter les dérives.
Ces sites participatifs préfigurent donc une nouvelle forme
éditoriale, non plus centralisée autour d’un modèle
pyramidal, mais fonctionnant sur un modèle réticulaire,
où chaque individu est à la fois consommateur et producteur
du média. Pourtant, l’autorégulation est essentiellement
pratiquée par des catégories de « super utilisateurs
» dont le pouvoir et le degré d’implication dépassent
amplement ceux des simples participants. Des études ont par
ailleurs démontré que cet engagement répondait
souvent à une dynamique de reconnaissance communautaire, au-delà
d’un comportement altruiste.
Dans ces conditions, les médias citoyens sont-ils vraiment
innovants ? Ne risquent-ils pas de se professionnaliser et d’évoluer
vers un modèle hiérarchisé ? Leur objectif égalitaire
pourra-t-il résister à leur transformation en média
de masse ?
«La critique journalistique des DVD
vidéo : une deuxième chance pour la critique cinématographique
française ? »
Annick Batard
Université Paris 13 - LABSIC, MSH Paris Nord, France >>> Télécharger le texte de la communication
Nous nous intéressons à la critique des DVD vidéo,
dans la continuité de nos propos ayant montré l'importance
de la critique journalistique dans la légitimation du cédérom
comme produit culturel. Nous interrogeons ici l'apparition et la
forme prise par la critique des DVD vidéo dans la presse écrite
généraliste et les évolutions qu'elle représente
par rapport aux critiques journalistiques traditionnelles. Nous considérons
un peu le DVD vidéo face au film de cinéma, comme le
livre de poche pour le livre princeps, c'est-à-dire que le
second représenterait un second marché du premier.
S'il y a un peu de cela, il y a aussi des choses nouvelles à prendre
en compte. Nous cherchons donc à examiner dans quelle mesure
il y a filiation (sur l'objet et sa critique) mais aussi dans quelle
mesure au contraire, il y a nouveauté.
Rappelons qu'un DVD est un disque compact sur lequel est enregistré des
sons, des textes et/ou des images. Il est possible de distinguer un DVD vidéo
d'un DVD-Rom, mais souvent, la presse généraliste parle de
DVD, (sous-entendu vidéo) proposant un film, auquel est souvent
(mais pas obligatoirement) adjoint un ou des "bonus", c'est-à-dire
un "supplément" au film. Si l'appellation "bonus" laisse
sous-entendre un aspect anecdotique, ce n'est pourtant pas toujours le cas. Indiquons
aussi que la critique de DVD est principalement, mais pas exclusivement, traitée
par les critiques cinématographiques des journaux. Nous montrons ici la
filiation de la critique de DVD vidéo dans celle des critiques journalistiques
plus traditionnelles, et même dans celle plus nouvelle des nouveaux produits
culturels multimédias, mais nous abordons aussi les spécificités
de la critique des DVD vidéo. La critique des DVD procède à l'instar
de ses consoeurs en examinant le contenu du DVD et en en proposant un rapide
résumé à ses lecteurs. Elle porte également un jugement
de valeur sur le contenu de l'œuvre. Les critères techniques, qui
apparaissent déjà dans la prise en compte de la critique des cédéroms
et des jeux vidéo ne sont pas oubliés et font souvent l'objet des
analyses et des commentaires de la critique des DVD. Du point de vue des œuvres
critiquées, le DVD et sa critique journalistique oscillent, du
côté de la production, entre remise à l'honneur d'œuvres
oubliées et regroupement de titres d'un même auteur pas forcément
oublié mais qui fait œuvre du fait de l'édition de plusieurs
titres sous un même coffret. Le DVD et sa critique journalistique hésitent
aussi, du côté de la réception, entre ce qui peut être
perçu comme ésotérisme de certaines œuvres cinématographiques
très peu connues du grand public et à l'opposé, entre reconnaissance
et collection d'œuvres très connues ou appréciées
du grand public.
« L’émergence et la circulation
de nouveaux objets dans le champ des industries culturelles à
travers l’analyse des usages du ‘podcast’»
Camille Brachet
Université Paris 4-Sorbonne - Celsa, France
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Les récentes mutations observables concernant les industries
de la culture, de l'information et de la communication ont permis
le développement de nouveaux produits culturels.
Je vais me limiter à un type d'objet en particulier, le «
podcast », afin de montrer en quoi la propagation d’une
pratique marginale a permis l’émergence d’une nouvelle
industrie de contenus audiovisuels. A partir des possibilités
proposées par Internet, les usagers produisent régulièrement
de nouveaux objets tels que le « blog », l’«
audioblog », le « podcast », de nouvelles pratiques
comme le « podcasting » (action de « poscaster »),
et les font sans cesse évoluer. Ces objets et leurs contenus
s’articulent et circulent dans une macrostructure administrée
par une microcommunauté (couramment appelée «
blogosphère »), pour s’étendre à
une sphère plus large.
Avant toute analyse, il me semble indispensable de procéder
à une rapide définition des objets étudiés
: qu’est ce que le « podcasting » ? Quelles en sont
les déclinaisons observables ?
Le terme « podcasting » est né de la combinaison
de « iPod » (le baladeur MP3 commercialisé par
Apple) et de « broadcasting ». Il s’agit d’un
système de diffusion et d'agrégation de contenus audios
destinés aux baladeurs, tels que l'iPod. En ajoutant les technologies
nécessaires au téléchargement automatique de
fichiers audios et vidéos, le « podcasting » a
été véhiculé par les « blogs »
: les « blogs » permettent aussi à leurs auteurs
de publier eux-mêmes leurs fichiers audios ou vidéos
; le « podcasting » permet maintenant de télécharger
automatiquement l'écrit, l'audio, la vidéo dans les
ordinateurs personnels et les baladeurs. On peut également
distinguer de toutes ces formes les « audioblogs », des
« blogs » qui proposent des contenus audiovisuels.
C’est finalement un outil (l'Ipod) associé une technologie
qui a permis l'émergence d'un nouvel objet véhiculant
de nouveaux contenus culturels. Ce nouveau mode de diffusion et de
consommation de contenus a ensuite circulé pour atteindre une
sphère élargie, jusqu'à sa réappropriation
commerciale, elle-même à l'origine de nouveaux usages.
Ce sont plus particulièrement ces usages et leurs enjeux que
ma communication se propose d’analyser.
Différentes technologies se combinent pour construire un nouvel
objet multimédia, hybride, façonné par les usages,
empruntant aux nouveaux médias, ainsi qu’aux médias
traditionnels. Aujourd’hui, on distingue globalement deux grandes
sortes de « podcasts » : ceux des particuliers, et ceux
des médias. En effet, on assiste à une récupération
très rapide de cette nouvelle façon de consommer les
contenus, par les radios d’abord, par les chaînes de télévisions
ensuite. Les modes de consommation des médias de masse sont
redistribués : d’une consommation de flux, l’auditeur
passe à une consommation à la carte. Les pratiques se
modifient donc et les contenus s’adaptent nécessairement.
A partir d’observations réalisées sur Internet,
je propose de mettre en perspective ces nouvelles pratiques et leurs
conséquences sur le paysage audiovisuel.
« La circulation des programmes télévisés
par les réseaux Torrents :
genèse, structuration, usages et influences »
Aurélien Le Foulgoc
Université de Paris 2 - Institut Français de Presse,
France >>> Télécharger le texte de la communication
L'apparition d'un nouveau mode de consommation de la télévision
en liaison avec l'essor des réseaux constitue une des nouvelles
pressions des communautés d'utilisateurs contre les industries
culturelles. Le protocole Bittorrent (une nouvelle variante du «
Peer-to-peer ») a été pensé pour l'échange
de fichiers vidéos lourds. Comment s'organise ce réseau
d'échange ? Quels sont les contenus télévisés
véhiculés ? Ces modes d'échanges utilisés
par les internautes pour diversifier leur parc de programmes n'aboutissent-ils
pas finalement à une uniformisation plus rapide et plus grande
des pratiques télévisuelles ?
La télévision subit ces dernières années
de profondes mutations techniques, notamment en raison de la montée
en puissance des réseaux et de l'informatique. Il en résulte
une nouvelle circulation et un changement des habitudes de consommation
des programmes télévisés. L'accès rapide
et aisé à une masse de programmes pose en effet problème
et instaure de nouveaux rapports de force. Nous souhaitons montrer
comment, grâce à de nouveaux matériels d'enregistrement
et de numérisation de la télévision, un réseau
mondial de circulation de certains contenus télévisés
s'est imposé. Des séries, en passant par les Talk-Shows
à la mode, une nouvelle économie de l'échange
permet un accès à un contenu télévisuel
mondialisé, mais essentiellement dominé par les anglo-saxons.
Cette domination s'explique en partie par la rencontre entre deux
procédés techniques et logiciels conçus aux Etats-Unis
: dans un premier temps il s'agit du développement commercial
du procédé d'enregistrement TIVO. Un nouveau protocole
d'échange de fichiers a ensuite permis la diffusion mondiale
des vidéos numérisées et débarrassées
de toute publicité. Le protocole d'échange Torrents
permet en effet la diffusion à grande échelle d'un programme
quelques heures seulement après sa diffusion.
Ce système de partage est principalement combattu par les
industries télévisuelles et cinématographiques
américaines. Sa pérennité semble cependant assurée,
puisque la BBC développe actuellement un nouveau système
de consommation de ses programmes à partir de ce protocole.
Ce nouveau service, appelé BBC IMP, permet la réception
à la carte d'une sélection de programmes télévisés
des chaînes de la BBC sur sept jours. Il s'agit clairement de
l'assimilation par l'industrie culturelle de braconnages d'utilisateurs.
Mon étude sera tout d'abord socio-discursive et visera à
démontrer comment et pourquoi le phénomène est
né aux Etats-Unis. Je procéderai ensuite à une
étude structurelle afin de montrer la circulation des programmes
ainsi que l'organisation de ces filières vidéos (fournisseurs,
sites, relais, clients,...) très organisées qui nourrissent
culturellement de plus en plus d'utilisateurs. A partir d'une étude
de différents sites d'échanges, qui constituent les
seuls points de visibilité du système Torrents, je souhaite
montrer la répartition des types de programmes, de leur nationalité,
de leur régularité d'apparition et de leurs modes de
circulation. Il se forme une véritable grille de programmes
correspondant aux goûts et attentes du public initié
à ces nouvelles pratiques. Je montrerai aussi la répartition
des nationalités des consommateurs de ces programmes, afin
de mettre au jour l'étendue géographique et la structuration
de ce réseau d'échanges.
C'est parce que ce nouveau mode de consommation des programmes a
un impact sur le système médiatique qu'il est aujourd'hui
fondamental de le questionner. Le passage de Jon Stewart dans l'émission
Crossfire sur CNN en 2004 a d'ailleurs marqué une rupture,
puisque le programme a été plus vu aux Etats-Unis sur
les réseaux Bittorrent que par la diffusion « classique
». En France, le phénomène a aussi un impact important,
puisque de plus en plus d'adolescents visionnent les séries
de la télévision américaine, sous-titrées
en français, un an avant leur diffusion effective. Au-delà,
par ce nouveau mode d'échanges, les utilisateurs français
accèdent à des émissions de la télévision
américaine, canadienne ou anglaise, qui étendent et
modifient leur vision du monde médiatique.
« Essai de typologie des positionnements
stratégiques
des producteurs de l’information en ligne »
Nikos Smyrnaios
Université Stendhal-Grenoble 3, GRESEC, France >>> Télécharger le texte de la communication
Les producteurs de l’information en ligne, tels que nous les
définissons ici, sont les structures qui se chargent d’assurer
le processus de collecte et de traitement de l’information relative
à l’actualité, selon des critères journalistiques,
et qui le diffusent sur l’internet.
Malgré leur hétérogénéité
relative, les acteurs qui font partie de notre échantillon
ont un certain nombre de caractéristiques communes qui permettent
une analyse comparative. Leurs compétences se concentrent dans
le segment éditorial de l’information en ligne, par opposition
à la composante technique qui est le domaine privilégié
des infomédiaires. Néanmoins, ils rencontrent des difficultés
à rentabiliser leur activité. En effet, la majorité
des structures qui sont présentes sur ce marché sont
déficitaires.
Notre communication se propose d’effectuer une typologie des
stratégies mises en œuvre par les producteurs de l’information
en ligne dans leur effort d’adaptation au nouvel environnement
concurrentiel de l’internet. La typologie des positionnements
stratégiques se présente de la manière suivante
:
- Les « conservateurs » de référence
Il s’agit d’un positionnement stratégique fondé
en grande partie sur le paiement par l’usager et sur un investissement
important en termes éditoriaux. Ce sont des supports de référence
dans leurs domaines respectifs qui tentent de valoriser leur position
dominante afin de combiner des ressources financières en provenance
de la publicité avec la vente d’abonnements en ligne.
Nous pouvons le rapprocher au « modèle de club ».
- Les « inventeurs sous contrainte »
Ce positionnement stratégique est caractérisé
par un financement en provenance de la publicité et des faibles
investissements éditoriaux. Or, l’adoption d’un
tel modèle économique constitue un choix par défaut.
En effet, les acteurs en question souhaitent fortement bénéficier
d’un financement de leurs sites respectifs de la part des usagers,
mais ne disposent pas des moyens financiers, techniques et humains
nécessaires afin de procéder à la mise en place
d’un modèle payant.
- Les « vases communicants »
Une configuration porteuse en termes économiques est celle
des sites affiliés à des chaînes de télévision
privées. En effet, dans ce cas, une grande partie de revenus
provient de la vente de services dans le domaine du divertissement.
Le levier qui permet à cette offre payante de bien fonctionner
est l’audience massive du média d’origine.
- Les « vitrines éditoriales »
Parmi les acteurs que nous avons examiné, nous avons repéré
un certain nombre pour lesquels l’édition des sites d’information
constitue en quelque sorte une « vitrine » éditoriale
pour leur activité principale. L’activité d’éditeur
est stratégique pour ces acteurs parce qu’elle leur procure
une notoriété et un prestige qui servent à attirer
une clientèle pour leur activité principale.
- Les acteurs transnationaux financiarisés
Les acteurs en question ont été parmi ceux qui ont tenté
d’appliquer le principe de convergence de manière relativement
suivie. C’est ainsi qu’ils ont adopté un fonctionnement
en réseau qui implique une mutualisation de moyens à
un niveau mondial. L’objectif de la stratégie mise en
œuvre par ces sociétés est la constitution d’une
offre d’information standardisée qui peut potentiellement
être diffusée sur n’importe quel support numérique
avec un minimum d’adaptation.
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